Les judicieux conseils de Thierry Mary pour le concours de la BD Scolaire du Festival d’Angoulême sont de retour ! Après avoir examiné le fonctionnement du concours et son règlement, il nous emmène désormais dans le vif du sujet, les bases de la création : l’inspiration…
T. Mary : Vous passez déjà beaucoup de temps à dessiner, à enchaîner les images avec toujours autant de plaisir…
Vous venez donc de prendre une décision définitive et sans appel : vous allez participer au concours de la BD Scolaire organisé par la Caisse d’Epargne.
Allez hop, on s’y met.
Vous faites de la place sur votre espace de travail, que dis-je, de création, vous sortez votre plus belle feuille, vos crayons sont taillés comme jamais ils ne l’ont été…
Allez hop ! un petit verre de jus d’orange, c’est plein d’énergie, et vous allez en avoir besoin !
Vous éteignez la télé, la radio… rien ne doit troubler votre concentration.
Vous êtes prêt, vous vous installez confortablement sur votre chaise avec la même expression sur le visage que pouvait avoir Alexandre le Grand avant de conquérir le monde.
Oui, certes, oui, mais voilà, c’est le drame, une heure plus tard, votre expression ressemble plus à celle de Napoléon à Waterloo.
Alors que tout le monde sait que vous avez une imagination débordante, que les idées fusent dans tout les sens, vous faites toujours face à une feuille d’un blanc désespérant et déprimant.
Vous abandonnez donc votre page blanche et décidez de faire vos devoirs, un peu de math, ça vous changera les idées…
Vous tentez de résoudre un exercice qui consiste à déterminer à quel moment deux trains se percuteront sachant qu’ils partent de deux gares différentes à des horaires différents et qu’ils roulent, là encore, à des vitesses différentes. Votre imagination se met alors en action. Vous imaginez un passager, puis un second, le conducteur du train qui se rend compte qu’il file droit vers un dramatique accident, votre imagination dérive vers le second train, d’autres personnages interviennent, les idées abondent, enfin !
Vous vous dépêchez de régler ce petit problème de math et vous vous retrouvez de nouveau devant votre feuille à dessin. Là, vous commencez à dessiner un train, une locomotive, des wagons…des rails. Et puis, votre imagination vous ramène vers l’exercice de math, vous avez un doute sur vos calculs, vous secouez la tête et revenez à vos dessins, vous regardez vos trains, pas mal, mais … vous avez oublié la plupart de vos idées géniales et détonantes…
L’imagination n’est pas véritablement «contrôlable».
Vous devez avoir en permanence un petit carnet dans lequel vous noterez tout ce qui vous passe par la tête, que ce soit une histoire ou un croquis.
Le fait de noter une idée permet d’une part de ne pas l’oublier, çà c’est déjà énorme. Et d’autre part de la rendre plus claire, plus nette en vous permettant de la relire avec un peu de recul. Tout ceci pour finalement décider si c’était vraiment une idée géniale ou, au contraire, qu’elle n’était pas si bonne voire carrément mauvaise.
Si vous manquez d’inspiration, vous devez trouver « des déclencheurs ». Concernant le concours de la Caisse d’Epargne, sur la thématique sur les Jeux Olympiques par exemple, il « suffit » de se plonger dans l’histoire de cet évènement sportif pour trouver une idée, un évènement, que vous souhaiteriez raconter. Pour autant, il vous faudra trouver un point de vue pertinent et original. Vous ne serez peut être pas tout seul à avoir choisi de relater cet évènement particulier. La différence se fera donc à la fois sur le graphisme, le dessin et dans la façon de le raconter.
Il peut paraître plus grisant de se lancer dans une thématique libre. Ha ! Pouvoir raconter ce que l’on veut, comme l’on veut, être libre et sans contraintes, le pied… En fait c’est souvent plus compliqué car une contrainte sert souvent de point de départ, d’élément déclencheur.
Sans contrainte, vous devez être plus perspicaces. Votre premier objectif est de trouver un point de départ, le bout du fil de l’histoire que vous allez ensuite dérouler pour le plus grand plaisir du lecteur. Cela peut être une situation banale comme raconter un évènement qui vous est arrivé en allant sur le chemin de l’école, ou pourquoi ne pas simplement raconter votre petit déjeuner. A partir de ce point de départ une bonne stratégie est souvent d’intégrer un élément perturbateur, réel ou fictif :
– Il n’y a plus de lait pour manger avec les céréales et cela rend votre personnage très bizarre.
– Sur le chemin de l’école, vous vous rendez compte que tout le monde est habillé en rose, mais pourquoi…
En bref, prenez une situation de départ normale, rajoutez un élément surprenant et trouvez une chute à votre histoire… facile à dire, n’est ce pas ?
Prenez aussi en compte le fait que vous pouvez transposer cette situation de départ dans un autre environnement : vous habitez en ville, imaginez comment les choses se dérouleraient si vous habitiez à la campagne voire à une autre époque, au moyen-âge, ou en 2222 par exemple.
L’imagination fonctionne rarement sur commande mais c’est une gymnastique de l’esprit que vous pouvez et devez pratiquer : pensez toujours à observer ce qui se passe autour de vous et comment toutes ces situations pourraient évoluer. Vous y trouverez souvent la matière nécessaire pour faire une bonne histoire. N’oubliez pas de noter vos idées, toutes vos idées, et prenez aussi celles qui sont proches de ce que vous avez envie de dessiner. Si vous détestez dessiner les trains, n’allez pas à la gare pour pêcher des idées… ou alors trouvez vous un copain qui lui adore dessiner les trains…
Thierry MARY
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Biographie :
Thierry Mary est le Directeur de l’Iconograf. Créé en 2003, l ’Iconograf est organisme de formation à la bande dessinée situé à Strasbourg. Depuis 2009, cet organisme est présent à Paris sous le nom de CESAN. L’iconograf propose également une formation à distance.
Thierry dirige la collection d’ouvrages pédagogiques « les cahiers de l’image narrative » coéditée avec le CRDP d’Alsace, Il est aussi le co-fondateur des éditions ASTEURE.
Les liens:
L’icconograf : http://www.liconograf.com
atelier : http://www.liconograf.com/atelier
Asteure : http://www.asteure.fr
Cesan : http://www.cesan.fr
blog : http://www.ecolebd.com
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Thierry Mary a également répondu à de nombreuses questions sur le mode d’emploi de la fabrication d’une BD ainsi que sur les modalités de participation et le règlement.
L’article récapitulant les informations sur le concours de la BD Scolaire 2012 est consultable ici
Tous les articles sur la BD Scolaire sont regroupés ici
Les trois premières illustrations ont été réalisées par Guillaume Cribeillet, la suivante par Jérémy Langard, et la dernière par Béatrice Revel.
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